Le conférencier, un des rares acteurs du mouvement national algérien encore vivant, a répété à plusieurs reprises que les témoignages ou les écrits historiques faits concernant ces bouleversements survenus à la veille du déclenchement de la guerre de libération nationale appelés « crise berbériste de 1949 sont faux à 90%. Toutefois, Me Rachi Ali-Yahia n’a cité aucun nom de ceux accusés d’avoir menti ou de s’être trompés sur cette période de l’histoire de l’Algérie.
Toujours est-il cependant, que l’assistance, nombreuse et composée majoritairement de la grande famille universitaire, a identifié les personnalités ciblées par le conférencier à savoir principalement Hocine Aït-Ahmed et le Dr Saïd Sadi.
Dans la logique d’un « correctif », Me Rachid Ali-Yahia a commencé d’abord par parler de la source du mouvement national qui remonte à 1924, année de la tenue du congrès de l’internationale socialiste en Russie, et ce sous l’impulsion du parti communiste français (PCF). Toutefois, l’événement planétaire de 1924 ne sera pas développé puisqu’il sautera directement à 1926, année qui a vu la création de l’Etoile Nord-Africaine (ENA) dont « l’objectif était de mener une lutte pour l’indépendance de toute l’Afrique du Nord ». Toutefois, la vision concernant l’indépendance de toute l’Afrique du Nord sera rétrécie pour ne concerner finalement que l’Algérie.
Et avant de poursuivre le fil des événements dans le sens chronologique, le conférencier fait un énorme plongeon dans l’histoire de l’islam pour y conjuguer la donne portant sur la langue arabe, celle-là même qui sera « la principale cause de la crise berbériste qui, contrairement aux idées préconçues, se poursuit encore aujourd’hui ». Me Rachid Ali-Yahia se montrera particulièrement dur en l’endroit de l’arabe académique, « langue développée et utilisée au seul profit de l’aristocratie dont le seul et unique objectif a toujours été de dominer le peuple ».
Le conférencier ne tardera pas à aller à contre sens de ce que l’assistance a toujours considéré comme vrai en révélant que « la crise berbériste a pris naissance en France et c’est en France que les événement s’y afférents se sont déroulés ». « Ici en Algérie, poursuit le conférencier, seuls quelques étudiants qui ne maîtrisaient ni le dossier ni possédaient les moyens de se rapprocher de la Kabylie ». ( Ces étudiants en question se trouvaient à Alger même si aucune précision ne sera faite par le conférencier). Comme acteurs principaux du mouvement berbériste, Me Rachid Ali-Yahia parlera de lui-même, de Ali Laïmèche, Ouali Benaï, Amar Aït-Hamouda et à un degré moindre de M’barek Aït-Menguellet.
Le conférencier leur rendra hommage en parlant de leurs convictions et de leurs opinions politiques ainsi que de leur engagement corps et âme pour l’indépendance de l’Algérie. Et au même temps, il signalera que leur liquidation physique a été ordonnée par le FLN, plus exactement suite à l’ordre signé par les Six, dont Krim Belkacem, Abane Ramdane, Amar Ouaamrane, Ben Tobal.
« Moi-même, révèle le conférencier, on a essayé d’attenter à ma vie à plusieurs reprises ». Sur le même registre, Me Rachid Ali-Yahia déclare que s’il a eu la vie sauve, c’était d’abord au cercle qu’il a créé autour de lui pour le protéger, sa décision de ne porter en aucun cas une moindre critique à la politique du FLN et surtout l’opposition farouche qu’opposa Omar Boudaoud, président de la Fédération FLN de France d’alors à son exécution, et ce en dépit des terribles pressions qui pesaient sur lui. « Aujourd’hui encore, je ne comprends pas pourquoi Omar Boudaoud m’a protégé », a signalé le conférencier avant de révéler qu’il tenait absolument a manifester sa reconnaissance à l’homme qui l’a protégé « pendant qu’il est encore vivant ».
Abordant la question portant spécialement sur la guerre d’indépendance, Me Rachid Ali-Yahia reconnaît la grande intelligence avec laquelle elle a été menée et au même temps avouera que les dirigeants du FLN n’étaient pas des intellectuels, hélas. « Krim Belkacem par exemple, que j’ai rencontré une fois en France durant la guerre , et sur sa demande, n’était pas un intellectuel, il n’avait comme référence et bagages scolaires qu’un certificat d’études », a lâché le conférencier pour ensuite ajouter que « Benaï Ouali, contrairement à ce qui a été rapporté à son propos n’était pas un intellectuel non plus ». Me Rachid Ali-Yahia a considéré toutefois que c’est la fibre patriotique qui a fait d’eux des génies.
Abordant ensuite le volet portant sur le futur de l’Algérie puisqu’il s’est défini comme « un visionnaire », le conférencier a signalé que l’arabe académique perdra du terrain pour laisser place à tamazight concernant la population berbérophone et l’arabe algérien pour la population arabophone, le principe même que les berbéristes du mouvement national ont soulevé et défendu. « Aujourd’hui encore ce principe est valable puisqu’il n’a été question d’autre que défendre une Algérie algérienne », a martelé Me Rachid Ali-Yahia. C’est dans ce sens aussi qu’il a lancé un appel aux esprits patriotiques de renforcer la lutte car « le danger est toujours là », mais cette lutte doit se faire dans un cadre pacifique.
Tout en dénonçant la perte du terrain de tamazight au profit de l’arabe, le conférencier se lancera dans l’histoire de l’islam et sa corrélation avec l’arabe académique. Me Rachid Ali-Yahia ira même jusqu’à déclarer que le coran a été divulgué dans l’arabe dialectal mequois et le prophète Mohamed n’a jamais fait de distinction entre un Arabe musulman et un musulman non Arabe. « C’est le calife Mouaâouia, qui pour des dividendes politiques, a ordonné à ses savants de trouver une langue académique avec laquelle seront inscrits et dictés les préceptes de l’islam, et ce aux fins le peuple sous la domination de l’aristocratie et de l’élite », a signalé le conférencier. « Une langue qui n’est pas comprise par le peuple ne peut se développer » , a conclu le conférencier après une multitude d’aperçus historiques sur l’arabe académique et l’islam.
Notons également que Me Rachid Ali-Yahia a reconnu que sur le plan politique et idéologique, il a toujours été aux antipodes avec son frère Abdennour ». « Je reconnais seulement qu’il est mon frère biologique », a-t-il avoué sans l’ombre d’un regret. En dernier, il y a lieu de relever qu’au cours de la matinée, Me Rachid Abdennour a procédé dans le hall de la maison de la culture Mouloud Mammeri à la vente dédicace de son livre intitulé « Pour une Algérie Algérienne fédérale, Démocratique et Sociale ».
De Tizi Wezzu, Said Tissegouine pour Tamurt
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